Selon, Sabine Gräfe, directrice d’études chez Xerfi, « une conjonction d’éléments favorables a crédibilisé le phénomène « Tech », à commencer par une action législative orientée vers une plus grande ouverture à la concurrence de nombreux marchés de l’assurance, laquelle a d’ailleurs porté concrètement un coup aux pratiques de tacite reconduction et facilité la mobilité́ des assurés. Par ailleurs, des profils clients de plus en plus habitués aux expériences digitales portées par les géants du numérique et qui expriment de nouvelles attentes et exigences en matière d’instantanéité́, d’autonomisation mais aussi de simplicité́ d’accès constituent un autre élément favorable. Enfin, le foisonnement technologique sans précèdent a ouvert la voie à de nombreuses opportunités. Des opportunités qui sont sans doute plus faciles à saisir pour de jeunes entreprises, dotées de structures plus légères et partant de feuilles blanches, qui font la preuve de leur capacité́ à se redéployer rapidement.
Après la banque et la finance, le secteur de l’assurance est ainsi à son tour gagné par l’effervescence technologique, alimenté par plusieurs initiatives de start-up qui dessinent les contours de l’assurance de demain. Assurance P2P, à la demande, à l’usage ou ponctuelle, achats groupés, parcours d’achat 100% digitalisés : au-delà̀ de la refonte des offres, ces jeunes pousses imaginent de nouvelles formes de mutualisation, réinventent les modalités d’accès aux produits et élèvent les standards de l’expérience client. Débarrassés des coûts de structure des acteurs traditionnels, les AssurTech ont également un positionnement tarifaire agressif ».
Face à ces nouveaux acteurs, le secteur réagit, s’adapte et mute. Ainsi, selon Aurélien Vernet, chargé d’études senior chez Xerfi, « le marché́ français de la cyber assurance a bénéficié́ de vents favorables en 2018 sur le plan règlementaire avec la transposition en droit national de la directive NIS (network and system information Security) pour certains secteurs jugés sensibles et l’entrée en vigueur du RGPD (règlement général pour la protection des données). Parallèlement, les cyber attaques ont pris un tournant systémique.
A titre d’exemple, NotPetya a touché des milliers d’entreprises dans le monde dont la Française Saint-Gobain qui a perdu plusieurs dizaines de millions d’euros de chiffre d’affaires. Ralentissement, voire arrêt, de la production, retards de livraison ou encore fuite de données sensibles, les cyber attaques ont un impact considérable sur l’activité́ des entreprises. Pourtant, le marché́ de la cyber assurance ne pèse pour l’heure que 80 millions d’euros. Il est vrai que les freins à la souscription ne manquent pas. D’abord, la couverture contre le risque cyber se concentre sur les grands comptes. Ensuite, de nombreuses entreprises et particuliers ne soupçonnent même pas l’existence de polices cyber spécifiques, encore relativement récentes. Enfin, certaines offres de cyber assurance manquent de clarté́, en particulier lorsque celles-ci sont intégrées aux polices responsabilité́ civile et dommages traditionnelles.
Ce marché embryonnaire est pourtant promis à un bel avenir. Les primes de cyber assurance devraient ainsi doubler à l’horizon 2020 pour atteindre 160 millions d’euros, selon nos prévisions. Les particuliers et les petites entreprises sont en effet sous-équipés et le potentiel de croissance sur ces segments reste immense sur fond d’accélération des cyber-attaques. Si la plupart des entreprises du CAC 40 sont désormais assurées, moins de 5% des TPE/PME le sont ».
Pour Aurélien Vernet, « c’est un véritable exercice d’équilibriste qui attend en réalité́ les assureurs pour répondre à une demande croissante pour s’imposer sur le marché́ tout en restant prudents face à une sinistralité́ potentiellement élevée et encore difficile à évaluer. Aujourd’hui, les cotations des primes sont bien souvent calculées sur la base du chiffre d’affaires de l’entreprise, son activité́ ou encore sa situation géographique. Sauf que ces critères ne reflètent pas systématiquement le niveau de risques et de vulnérabilité́ des entreprises aux cyber menaces. Le cyber risque est en effet un risque émergent et de nature complexe en raison de son caractère systémique et évolutif ».
Et pour tirer parti de ce marché de niche à fort potentiel, Aurélien Vernet constate que « les acteurs sont passées à l’offensive pour évangéliser le middle market ; l’équipement en cyber assurance paraissant acquis auprès des grands comptes. C’est ainsi qu’ils partent à la conquête des PME et des ETI avec des offres ciblées, à l’instar de Swiss Re, La Matmut ou encore Crédit Agricole Assurances. Tous leurs contrats ont un point commun : la place centrale des services d’assistance.
Au-delà̀ de la seule réponse indemnitaire, les assureurs misent en effet sur la prévention (notamment via l’audit des systèmes d’information) et l’accompagnement (comme par exemple la gestion de crise). C’est bien ce qu’illustre la multiplication des partenariats des assureurs sur ces deux volets. Les cyber assureurs sont également à la manœuvre pour sensibiliser les particuliers et les entreprises aux cyber menaces (réalisation de sondages, interventions dans des salons professionnels…). »
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