DigitalMag

chatGPT et la recherche sur internet, un changement de paradigme.

chatGPT et la recherche sur internet, un changement de paradigme.

C’est évident, le premier effet du succès chatGPT est de faire vaciller l’hégémonie de Google dans la recherche sur internet. Microsoft l’a bien compris en l’intégrant à son portail Bing, espérant prendre des parts de marché qui ne celui-ci n’a jamais pu atteindre face à son concurrent. Mais la généralisation de l’usage de ce moteur d’IA va probablement impacter d’autres pratiques, dont celle de la SEO.

Depuis sa sortie l’automne dernier, chatGPT, le moteur d’IA d’Open AI n’a pas tardé à être adopté par un très nombre d’utilisateurs. On parle de 100 millions d’utilisateurs et de 1,5 milliards de visites le mois dernier. Facilité d’emploi, interactivité, rapidité et pertinence des réponses – quand bien même cette dernière peut être parfois discutée – ont fait le succès rapide du service. Aussi, cette innovation produit une nouvelle façon d’exploiter l’existant sur Internet par la restitution directe du contenu approprié, court-circuitant la visite des sites sources dont est issue, souvent après retraitement par l’IA, la matière première de ces dits contenus. Il ne faut pas chercher bien loin pour comprendre que cette approche va impacter in fine tout l’écosystème de la recherche sur internet, à commencer par les moteurs d’indexation, en passant par la consistance des sites web eux-mêmes et toutes les techniques de SEO qui les accompagnent.

Google, l’arroseur arrosé

Cette arrivée de chatGPT sur le marché des services en ligne ressemble à celle de Google il y a 25 ans. A sa sortie, Google bousculait les Altavista, Yahoo et autres annuaires de l’époque en simplifiant la recherche de sites. Souvenez-vous : ces services historiques étaient bâtis sur des mécanismes d’inscription manuelle de site d’une part et une restitution très hiérarchisée d’autre part. Non seulement la recherche pouvait être fastidieuse – il fallait trouver la bonne rubrique – mais on n’était pas certains de l’exhaustivité des résultats. Avec un simple champ au milieu de la page comme habillage et une saisie réduite à un ou deux mots clés, la magie Google s’opérait en produisant rapidement la liste des sites contenant les réponses à notre recherche, classés par pertinence. Sous le moteur, une indexation préalable intelligente et un algorithme efficace de restitution faisaient la force de Google. En soit, c’était déjà un circuit raccourcit entre une recherche et ses réponses.

Maintenant, voyez comment une requête sur chatGPT ringardise cette approche Google dans bon nombre de cas, le chemin entre la question posée et sa réponse étant réduit au strict minimum (cf illustration : « recette de crêpe facile »). Le résultat est sans appel : l’affichage Google finit par être confus, celui de chatGPT, simple et efficace. C’est en cela que Google devient l’arroseur arrosé, se voyant victime du même impact que lui-même avait porté aux acteurs de l’époque, une nouvelle techno venant balayer la sienne.

On peut même enfoncer le clou en considérant qu’il se voit appliquer le même raccourcit mortifère que celui qu’il a mis en place au fil du temps sur bon nombre de contenus (hôtels, billets d’avion, orthographe, météo, etc…), en plaçant ses propres encarts en tête de résultats, réduisant à peaux de chagrin le visitorat des sites dédiés, dont étaient souvent issus ces contenus.

Google est cependant encore loin de perdre des parts de marché significatives ; mais le retard à l’allumage de sa propre IA (Bard) démontre pour certains une forme de frilosité : il s’agit de ne pas tuer sa poule aux œufs d’or qu’est son portail de recherche, si rémunérateur grâce au référencement payant.

Une nouvelle façon d’écrire le web

On sait que chatGPT compose ses réponses à partir des contenus indexés du web (antérieurs à 2022 pour la version 3.4, actuels pour la version 4). Si leur recette de fabrication reste le secret de son concepteur Open AI, les réponses fournies par l’IA restent une reformulation de contenus puisés dans des sites web à visibilité publique. Or, sauf dans le cas de Bing, qui affiche en marge de ses réponses les sites utilisés pour les produire, chatGPT produit une réponse anonymée, sans références aux sources utilisées. Ceci pose plusieurs problèmes.

Le premier est celui du droit d’auteur, que certains voient bafoué par l’usage abusif de contenus protégés, sans reconnaissance de propriété.

Le second est celui de la transparence. Comment en effet s’assurer de l’intégrité de la réponse fournie si aucune source n’est annoncée ? Il a déjà été observée que des réponses pouvaient être biaisées par la prééminence de certains sites, prompte à donner plus d’importance à certaines opinions ou orientations qu’elles n’en ont réellement.

Le troisième est finalement celui de la visibilité propre des sites d’entreprise. Comment exposer sur son site le contenu le plus consistant et pertinent pour attirer le visiteur sans risquer de se voir « vampiriser » par chatGPT sans retour de sa part ? L’exemple d’illustration est parlant :  la recette proposée est probablement celle (ou assez proche) d’une recette publiée sur un site de cuisine, qui ne récupérera pas de visiteurs sur cet affichage. Autre exemple patent : StackOverflow, le site de référence pour tous les codeurs du monde par la richesse de ses forums d’entre-aide a dû voir sa fréquentation largement impactée par la facilité avec laquelle chatGPT répond aux mêmes questions (diagnostic de code, aide à la composition…). Le site l’a bien compris puisqu’il vient d’annoncer sa propre offre intégrant de l’IA.

C’est probablement le nouveau défi que devra résoudre tous les acteurs de la conception de sites web, du webdesigner au SEO. Pour ce dernier, on peut même imaginer une inversion de tendance. Au lieu de chercher à consolider un site, avec un contenu suffisamment dense pour être bien vu par les moteurs d’indexation, il s’agirait de faire light : en dire le moins possible pour garder une force d’attraction interne mais suffisamment pour rester indexable et visible. Difficile équation.

Cet article vous a plu ? partagez-le :

Abonnement à la formule intégrale !

Le magazine Édition digitale sur ordinateur, mobile et tablette
Je m'abonne
Abonnement